1.Résiliation (discrétionnaire) du contrat de crédit par la banque
En cas d’un crédit hypothécaire avec une destination mobilière à durée indéterminée, le consommateur peut procéder à tout moment et sans frais à la résiliation du contrat, sauf stipulation contraire prévoyant l’existence d’un délai de préavis, lequel ne peut être supérieur à un mois.
Si l’initiative de la résiliation incombe au prêteur, et pour autant que le contrat de crédit le stipule, le préavis laissé au consommateur doit être d’au moins deux mois[1].
2. Suspension motivée du droit de prélèvement
Si le contrat de crédit le prévoit, le prêteur peut, pour des raisons objectivement justifiées, suspendre le droit de prélèvement du consommateur. Le législateur ne cite pas les raisons qu’il considérerait comme objectivement justifiées, mais indique toutefois que la justification est notamment objective « si le prêteur dispose de renseignements lui permettant de considérer que le consommateur ne sera plus à même de respecter ses obligations »[2].
Dans un tel cas, le prêteur informe le consommateur de la suspension et des motifs de celle-ci sur un support durable, si possible avant la suspension et au plus tard immédiatement après, à moins que la communication de cette information ne soit interdite par une autre législation ou ne s’oppose à des objectifs d’ordre public ou de sécurité publique.
La suspension est, comme son nom l’indique, susceptible d’être levée. Elle n’aboutit pas à la résiliation de plein droit, laquelle doit être sollicitée devant les tribunaux et prononcée par ceux-ci si les éléments invoqués à l’appui de la demande de résiliation sont fondés.
3. Résiliation pour non-exécution du contrat de crédit
En-dehors des possibilités de résiliation précitées, la nouvelle loi instaure pour principe, à l’instar de l’article VII. 105 du Code de droit économique en matière de crédit à la consommation, l’interdiction de toute clause de déchéance du terme ou condition résolutoire expresse, sauf si celle-ci permet la résiliation[3] en cas de défaut de paiement d’au moins deux montants d’un terme, d’une somme équivalente à 20 % du montant total dû par le consommateur, pour autant que celui-ci ne se soit pas exécuté dans un délai d’un mois après l’envoi recommandé d’une mise en demeure. Il s’agissait pour le législateur d’appliquer correctement l’article 28 de la Directive qui sollicite des Etats membres d’adopter des mesures pour « encourager les prêteurs à faire preuve d’une tolérance raisonnable avant d’engager une procédure de saisie »[4].
La clause résolutoire est également permise, dans le cas d’un crédit hypothécaire avec une destination mobilière, pour le cas où le consommateur aliénerait le bien mobilier financé avant le paiement du prix complet ou en ferait un usage contraire aux stipulations du contrat, alors que le prêteur s’en serait réservé la propriété.
Il en va de même en cas de faillite, en cas de diminution de la sûreté hypothécaire par le fait du consommateur, et à la suite d’une aliénation, vente, échange ou donation entre vifs, ou lorsque le bien immobilier sur lequel un mandat hypothécaire aurait été confié se voit grevé d’une hypothèque[5].
Indépendamment de l’existence de clauses contractuelles résolutoires, la résolution du contrat aux torts du consommateur peut toujours être prononcée par la voie judiciaire dans une série de cas limitatifs énumérés par la loi[6]. Ces cas doivent être repris expressément dans le contrat de crédit[7].
Parmi ceux-ci, relevons l’existence d’une saisie, par un autre créancier, du bien grevé d’une sûreté hypothécaire, mais également la diminution substantielle de la valeur du bien immobilier hypothéqué qui serait imputable au consommateur, par une modification de la nature ou de la destination, par une altération grave, ou par une pollution grave.
En cas de non-conclusion du contrat d’assurance incendie ou d’assurance solde restant dû ou d’assurance décès temporaire à capital constant convenu dans un délai de trois mois après le passage de l’acte authentique de crédit, ou encore si la solvabilité du consommateur a mal été évaluée compte tenu d’une dissimulation consciente, par le consommateur, d’une information, ou du caractère sciemment erroné de l’information prodiguée, la résolution du contrat aux torts du consommateur peut également être prononcée.
Dès qu’un défaut de paiement d’une somme due intervient, il incombe au prêteur de faire parvenir au consommateur un avertissement reprenant les conséquences du non-paiement, dans les trois mois de l’échéance, à défaut de quoi la majoration contractuelle des taux d’intérêt pour retard de paiement ne peut être appliquée sur l’échéance concernée par le respect d’une telle formalité[8]. La loi du 22 avril 2016 prévoit qu’en outre, pour cette échéance, un délai de paiement de six mois sans frais ni intérêts complémentaires doit être accordée par le prêteur, à dater du jour de l’échéance non honorée.
4. Frais et pénalités de retard et de résolution
En cas de simple retard de paiement – sans résolution du contrat ni déchéance du terme – d’un crédit hypothécaire à destination mobilière, le Code de droit économique limite les paiements que le prêteur pourra réclamer au consommateur aux paiements suivants :
- le capital échu et impayé ;
- le montant, échu et impayé, du coût total du crédit pour le consommateur ;
- le montant de l’intérêt de retard convenu calculé sur le capital échu et impayé ;
- les frais convenus des lettres de rappel et de mise en demeure, à concurrence d’un envoi par mois. Ces frais se composent d’un montant forfaitaire maximum de 7,50 EUR augmenté des frais postaux en vigueur au moment de l’envoi[9].
Le taux d’intérêt de retard convenu pour un crédit hypothécaire avec une destination mobilière ne peut être plus élevé que le taux débiteur dernièrement appliqué au montant concerné ou aux périodes partielles concernées, majoré d’un coefficient de 10 % maximum[10].
En cas de résiliation du crédit, aucun paiement ne peut être réclamé au consommateur outre le solde restant dû, le montant, échu et impayé, du coût total du crédit pour le consommateur, ainsi que le montant de l’intérêt de retard convenu calculé sur le solde restant dû[11].
D’autres pénalités convenues peuvent être appliquées outre ce qui précède, en cas de résiliation pour non-exécution par le consommateur de ses obligations, pour autant qu’elles soient calculées sur le solde restant dû et limitées à certains plafonds : 10 % au maximum calculés sur la tranche de solde restant dû comprise jusqu’à 7.500 EUR, et 5 % au maximum calculés sur la tranche de solde restant dû supérieure.
Tout paiement réclamé au consommateur en application de ce qui précède doit, en tout état de cause, être détaillé et justifié dans un document remis gratuitement à ce dernier[12].
Les paiements intermédiaires effectués par le consommateur ou par la personne s’étant constituée sûreté personnelle des engagements de l’emprunteur devront être imputés en premier lieu sur le solde restant dû et le coût total du crédit pour le consommateur, pour ensuite pouvoir l’être sur le montant des intérêts de retard ou autres pénalités et dommages et intérêts[13].
S’agissant du contrat de crédit hypothécaire avec une destination immobilière, les règles ci-dessus sont similaires[GL2] .
En cas de retard, de paiement, seuls les montants ci-après peuvent être réclamés au consommateur[14] :
- le capital échu et impayé ;
- les frais et intérêts échus et impayés ;
- les intérêts de retard à concurrence de 0,5 % sur base annuelle, et qui se calculent comme suit :
- en cas de non-paiement des intérêts à l’échéance : le solde restant dû au moment du retard de paiement multiplié par le taux périodique qui correspond au taux débiteur de 0,5 % ;
- exemple[15] : pour un crédit de 150.000,00 EUR à un taux d’intérêt périodique de 0,042 %, le calcul est le suivant : 0,042 % x 150.000,00 EUR = 63,00 EUR. Ce montant est une pénalité qui peut donc être facturée en plus du taux d’intérêt contractuel « ordinaire », conformément à l’article 1907, alinéa 3 du Code civil et qui est calculée sur le solde restant dû au moment du défaut de paiement[16].
- sur le capital impayé un intérêt de retard peut être calculé pro rata temporis au taux périodique du crédit, majoré d’un taux périodique qui correspond au taux débiteur de 0,5 %. Ces intérêts de retard commencent alors à courir à partir de la date de retard de paiement jusqu’au remboursement effectif.
Les frais de recouvrement judiciaire[17] demeurent à charge du crédité qui a succombé dans l’instance ou contre lequel l’exécution est poursuivie, conformément aux articles 1017 et suivants du Code judiciaire[18].
[1] Article VII. 147/13, § 1 du Code de droit économique.
[2] Article VII. 147/13, § 2 du Code de droit économique. La nature de ces renseignements n’est pas précisée par la loi, mais la disposition est la même qu’à l’article VII. 98 du Code de droit économique, pour ce qui concerne le crédit à la consommation. Le SPF Economie reprend les éléments suivants comme exemples de renseignements sérieux : saisie sur le compte, faillite, fraude, retard de paiement pour d’autres crédits, etc. Voy. Code annoté du crédit à la consommation, article 33 ter, § 2. Voy. également P. WERY, « Crédit à la consommation », Rep. Not., Tome VI, les obligations, la théorie générale du contrat, Bruxelles, Larcier, 2010, n° 816 et s.
[3] Article VII. 147/20 du Code de droit économique. Cette disposition existe en réalité depuis la loi du 9 juillet 1957 réglementant les ventes à tempérament et leur financement.
[4] L’exigibilité immédiate dès le premier retard de paiement avait du reste déjà été condamnée par la CJUE : voy. Arrêt C-415/11, Aziz c. Caixa d´Estalvis de Catalunya, 14 mars 2013.
[5] Article VII. 147/20, § 1, 5° du Code de droit économique.
[6] Article VII. 147/20, § 2 du Code de droit économique. Le législateur a précisé, dans les travaux préparatoires, le caractère limitatif des possibilités de résolution reprises dans la loi. Voy. Doc. Parl., 1685/001, p. 52.
[7] Article VII. 134 du Code de droit économique.
[8] Article VII. 147/21 du Code de droit économique.
[9] Article VII. 147/22 du Code de droit économique. Le Roi peut adapter ce montant forfaitaire selon l’indice des prix à la consommation.
[10] Article 147/22, § 3 du Code de droit économique.
[11] Article VII. 147/22 du Code de droit économique. Il s’agit d’une reprise de l’article VII. 106 existant en matière de crédit à la consommation.
[12] Le Roi peut déterminer les mentions de ce document et imposer un modèle de décompte.
[13] Article VII. 177/22, § 5 du Code de droit économique. Il s’agit d’une dérogation à l’article 1254 du Code civil.
[14] Article VII. 147/23 du Code de droit économique. Cet article est entièrement nouveau et ne provient pas de la Directive. Reprenant le principe applicable au crédit à la consommation, le législateur a adapté celui-ci au crédit hypothécaire.
[15] Doc. Parl., 1685/001, p. 53.
[16] Ce sont en réalité les dispositions de l’article 1907ter qui sont ici reprises, la méthode de calcul étant simplement précisée. Sur l’article 1907ter, pour aller plus loin, voy. C. BIQUET-MATHIEU, Crédit hypothécaire et crédit d’investissement – indemnités, frais et pénalités, op. cit., pp. 172-175.
[17] Qui doivent être justifiés. Voy. Cass., 16 décembre 2004, Pas., 2004, p. 2014.
[18] Il n’est nul besoin d’une clause contractuelle à cet effet. Voy. C. BIQUET-MATHIEU, op. cit., p. 189.